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Durée :

Colloque "Nanomatériaux et Sciences Quantiques"

Le

Palais Universitaire, Strasbourg

IUF - Institut Universitaire de France

En un peu plus d’un siècle, les sciences quantiques ont non seulement bouleversé notre façon d’appréhender le monde mais aussi généré de nombreuses avancées technologiques et donc sociétales. Par exemple, l’essor de la recherche fondamentale dans ce domaine a ouvert la voie à des technologies quantiques, qui promettent de révolutionner la société de l’information. Parallèlement, il est désormais possible de façonner, atome par atome, des matériaux atteignant des tailles critiques, de l’ordre du nanomètre, en-dessous desquelles des propriétés purement quantiques émergent. Ces nanomatériaux irriguent tous les domaines de la science (physique, chimie), de la santé (médicaments, biotechnologies) et de l’industrie (production et stockage de l’énergie, technologies de l’information, défense).
Ces avancées complémentaires convergent actuellement vers le développement et l’exploitation de ‘matériaux quantiques’, un champ de recherches à l’interface entre physique de la matière condensée, physique atomique et moléculaire, science des matériaux et information quantique.

Ce colloque a pour but de donner un aperçu des avancées scientifiques récentes autour des Nanomatériaux et des Sciences Quantiques, et d’identifier les grands enjeux et développements futurs sur ce thème.
Le format de ce colloque, où les experts de chaque discipline partageront leur point de vue sur les grands concepts et défis de leur domaine de spécialité, reflète le caractère pluridisciplinaire de ce vaste champ de recherche, et vise à encourager les échanges et les discussions au-delà des frontières disciplinaires traditionnelles.

Thème(s) : Sciences

Producteur : Université de Strasbourg

Réalisateur : Université de Strasbourg

Matin

Topologie et Machinerie Moléculaires

M. Jean-Pierre Sauvage

La topologie de faible dimension, en mathématique, et en particulier la théorie des nœuds, ont inspiré quelques chimistes des molécules il y a fort longtemps. Ce domaine a pris de l’ampleur et, depuis peu, des objets complexes de par leur topologie (nœuds et entrelacs ou liens) ont pu être synthétisés et étudiés. Incidemment, le domaine de la topologie moléculaire a conduit il y a longtemps, à celui des machines moléculaires comme cela sera expliqué au cours de l’exposé.
De nombreux processus biologiques essentiels font intervenir des moteurs moléculaires (naturels). Ces moteurs sont constitués de protéines dont la mise en mouvement, le plus souvent déclenchée par l'hydrolyse d'ATP (le "fioul" biologique), correspond à une fonction précise et importante. Parmi les exemples les plus spectaculaires, nous pouvons citer l'ATPas e, véritable moteur rotatif responsable de la fabrication de l'ATP. Pour le chimiste de synthèse, l'élaboration de molécules totalement artificielles, dont le comportement rappelle celui des systèmes biologiques, est un défi formidable.
L'élaboration de "machines" et "moteurs" moléculaires de synthèse représente un domaine particulièrement actif, qui a vu le jour il y a environ 25 ans. Ces machines sont des objets nanométriques pour lesquels il est possible de mettre en mouvement une partie du composé ou de l'assemblée moléculaire considérée, par l'intervention d'un signal envoyé de l'extérieur, alors que d'autres parties sont immobiles. Les chimistes ont ainsi pu fabriquer des moteurs rotatifs minuscules, des moteurs linéaires mis en mouvement par un signal électronique ou des "muscles" moléculaires de synthèse, capables de se contracter ou de s'allonger sous l'action d'un stimulus externe, etc. Des travaux récents démontrent que des machines de plus en plus complexes peuvent être obtenues. Les applications potentielles du domaine seront évoquées.

Le « halo symbolique » des nouvelles technologies (nanos ou quantiques)

M. Etienne Klein

Étienne Klein est ancien élève de l’École centrale Paris et a obtenu un DEA de physique théorique. Il a par la suite effectué un doctorat en philosophie des sciences. Il est directeur de recherche au Commissariat à l’énergie atomique (CEA). Il dirige actuellement le « Laboratoire de recherche sur les sciences de la matière », installé à Saclay. Il a participé à divers grands projets, en particulier la mise au point du procédé de séparation isotopique par laser et l’étude d’un accélérateur à cavités supraconductrices. Au CERN, il a participé à la conception du grand collisionneur de particules européen, le LHC. Il a enseigné pendant plusieurs années la physique quantique et la physique des particules à l’École centrale Paris. Il est actuellement professeur de philosophie des sciences. Il est spécialiste de la question du temps en physique.

Toute technologie produit un « effet de halo », comme le fit remarquer le philosophe Gilbert Simondon : elle rayonne autour d’elle une lumière symbolique, tantôt positive, tantôt négative, qui dépasse sa réalité propre et se répand dans son entourage, si bien que peu d’entre nous sont capables de la percevoir telle qu’elle est vraiment, tout entière contenue dans ses limites objectives et matérielles.
À travers leurs halos respectifs, par les perspectives qu’elles mettent en lumière, par les bouleversements qu’elles rendent envisageables, les nouvelles technologies, qu’elles soient ”nanos” ou ”quantiques”, finissent par s’arrimer à la question des valeurs : elles interrogent l’idée que l’on se fait de la société, de ce qu’elle devrait être ou ne devrait jamais devenir, et aussi notre façon d’y travailler, d’y occuper notre temps, d’être en rapport avec les autres et avec l’environnement.
Dansuntelcontexte,quelpeut-êtrelerôledeschercheursencesdomaines?Doivent-ilintervenirdans le débat public ? Et comment ?

Après-midi

Une carrière scientifique inspirée par la lumière

M. Serge Haroche

J’évoquerai dans cet exposé mon aventure personnelle, celle d’un chercheur passionné par la lumière qui a eu la chance de commencer sa carrière il y a près de soixante ans, au moment où le laser allait révolutionner la recherche fondamentale et la technolo gie. Le privilège d’un scientifique est de se vivre comme un maillon dans la longue chaîne du savoir, reliant les savants qui l’ont précédé aux futures générations qui continueront de porter les valeurs de la science et de répondre à des questions toujours renouvelées. J’évoquerai cette filiation en montrant combien les recherches sur la lumière ont depuis, le début de la science moderne, accompagné l’élaboration de la méthode scientifique et illustré ses traits caractéristiques. Il y a depuis Galilée jusqu’aux dernières avancées de la physique et de l’optique quantiques auxquelles j’ai eu la chance de contribuer une continuité que je rappelerai. J’évoquerai aussi l’importance de la transmission des savoirs et des valeurs à laquelle j’ai toujours pu me consacrer dans un environnement de confiance et de liberté. Je concluerai en espérant que les jeunes chercheurs qui entrent dans la carrière aujourd’hui pourront bénéficier de conditions comparables, indispensables à l’épanouissement d’une recherche plus nécessaire que jamais.

Table Ronde : Nanomatériaux et Sciences Quantiques pour l’Industrie

Vincent Bouchiat

Loic Charbonnière

Jérémy Paris

rapheal est une société en essaimage de l’Institut Néel du CNRS de Grenoble. Créée en Avril 2019, elle se concentre sur la production de graphène sur polymère et l’utilisation de ce matériau dans des capteurs intégrés couplés aux technologies iOT et mobiles. Grapheal introduit une technologie de biodétection numérique dans les systèmes embarqués et les objets nomades.
En associant la connectivité à la détection elle ambitionne de révolutionner les diagnostics sur le terrain et le suivi à domicile des patients à distance en offrant des outils de précision pour la télémédecine. Grapheal développe des capteurs qui permettent une surveillance et un diagnostic continus , en particulier pour le traitement des maladies chroniques.
Le premier produit, Woundlab, est un patch de suivi de cicatrisation qui va permettre aux soignants de disposer d'un outil d'évaluation amélioré et individualisé capable de détecter de manière précoce l’infection d’une plaie et son caractère chronique.
Grapheal propose également TestNpass, un test antigénique numérique ultra-rapide couplé à un smartphone. Ce test numérique délivre un pass numérique sous la forme d’un tag RFID crypté. Il est inviolable grâce à une empreinte biométrique qui permet de réaliser ce test sur le terrain et l’associer à un contrôle d’accès, utile pour dépister dans des lieux à forte affluence telles que les salles de spectacles, stades, bateaux de croisières et aéroports.
Poly-Dtech est une entreprise dédiée aux nanoparticules luminescentes dans le domaine de la santé et des sciences de la vie. Créée en 2019 par des experts en chimie et en détection, Poly-Dtech a pour but de devenir une plateforme, pionnière et leader, dans les marqueurs liés aux techniques d’analyses et d’imagerie. La vision de l’entreprise est d’améliorer le dépistage et la détection précoce de biomarqueurs spécifiques de certaines maladies afin d’augmenter le succès des traitements et de diminuer les effets secondaires sur les patients.
Problème : La détection efficace des biomarqueurs est un facteur limitant pour le progrès de la recherche scientifique et du diagnostic médical. La performance modérée des marqueurs actuels ne permet ni aux chercheurs ni aux entreprises de diagnostic d'avoir un avantage concurrentiel dans la détection de différents biomarqueurs.
Besoin : Ainsi, il existe un besoin évident de molécules aux efficacités de détection maximales, adaptées à tous les types de biomarqueurs, pouvant être largement utilisées à des fins de recherche et de diagnostic.
Notre Solution : La technologie NanoBright est la solution innovante et brevetée pour améliorer la sensibilité et la spécificité de détection des biomarqueurs ou des interactions cellulaires. Cette solution réside dans des nanoparticules luminescentes ultra-performantes avec des caractéristiques uniques. Leur efficacité élevée grâce à leurs propriétés spectroscopiques et leur simplicité d’usage permettront de remplacer les molécules fluorescentes utilisées aujourd’hui.
SON est une start-up créée en novembre 2020 issue de l’université de Bourgogne. SON es t s pécialis ée dans la conception, le développement et la fabrication de nanoparticules magnétiques fonctionnalisées. Notre mission est d’accompagner nos clients sur la voie des nanotechnologies en leur proposant toute une gamme de nanoparticules magnétiques fonctionnalisées ainsi que des services de synthèse sur mesure, de montée en échelle et d’analyse.
Nos nanoparticules magnétiques permettent le greffage rapide et efficient de différentes molécules fonctionnelles et trouvent de nombreuses applications dans le domaine de la santé, pour le diagnostic d’une part : diagnostic in vitro, imagerie IRM et MPI (modalité d'imagerie à particules magnétiques), et pour la thérapie d’autre part : vectorisation et hyperthermie. Nos nanoparticules sont également utilisées dans le domaine de l’environnement : pour la catalyse et la dépollution.
Fort de notre savoir-faire et de notre portefeuille PI, nous avons l’ambition de devenir un acteur incontournable dans l’industrie des nanotechnologies.

Contrôle et assemblage de nanoparticules pour la nanophotonique et ses applications dans les technologies quantiques

Christophe Couteau

Le développement des technologies quantiques devient un enjeu primordial de développement technologique, industriel mais également de connaissances scientifiques. Beaucoup d’obstacles restent à franchir pour la production, le controle et la mise à l’échelle des briques de bases de ces technologies à savoir les bits quantiques (qubits). Dans ce contexte, il est nécessaire de proposer de nouvelles plateformes de circuiterie optique quantique pour pouvoir assembler ces briques de bases et effectuer des portes logiques et des opérations quantiques. Cette nouvelle plateforme doit permettre dans le futur d’avoir des qubits stationnaires (pour effectuer des opérations & pour stocker l’information quantique) qui sont également couplés à des qubits ’volants’ qui transportent l’information quantique entre les noeuds d’un circuit optique quantique. Les photons sont les qubits volants de l’information quantique et les centres colorés dans des nanoparticules de diamant sont des bons candidats pour des qubits stationnaires. Le contrôle lumière-matière à l’échelle nanométrique est donc nécessaire et la nanophotonique est alors indispensable pour assembler et contrôler sur une même plateforme ces nanodiamants et les états quantiques photoniques de la lumière tout en gardant à l’esprit la capacité de mise à l’échelle de la plateforme. Nous présentons donc une stratégie nanophotonique qui consiste en un plateforme d’optique intégrée à base de verre qui va devoir comprendre une interface efficace entre les nanoémetteurs et les photons émis. Un des enjeux est de contrôler et d’assembler de façon efficace ce circuit photonique quantique (Fig. 1, gauche) pour avoir un maximum d’interaction lumière-matière indispensable pour effectuer des opérations quantiques. Un autre enjeu à ce stade est de déterminer si les nanodiamants constituent vraiment un bon qubit stationnaire (Fig. 1, droite).

Qui brise la symétrie ? Phases exotiques de la matière dans le monde des gaz quantiques

M. Guido Pupillo

lauréat d’une bourse ERC starting grant (2012 - Physical Sciences and Engineering / Fundamental Constituents of Matter) - Institut de science et d’ingénierie supramoléculaire / Institut de physique et de chimie des matériaux de Strasbourg

Les phases quantiques de la matière, telles que les cristaux, les superfluides et les
supraconducteurs, sont caractérisées par des symétries brisées. Ces symétries sont généralement
brisées une par une, et identifier des systèmes physiques qui échappent à ce paradigme est un défi fondamental. Dans cet exposé, je présenterai des résultats, à la fois anciens et nouveaux,
sur les phases quantiques et les propriétés de transport de particules quantiques avec des
couplages non locaux, comme par exemple dans les gaz quantiques avec des interactions dipolaires, de type "Rydberg", ou encore des interactions induites par une cavité. Nous
discuterons de la façon dont les couplages non locaux peuvent générer une grande variété de
phases quantiques, y compris des phases avec de multiples symétries brisées comme la célèbre
phase "supersolide". Nous fournirons en outre des preuves solides que les couplages non locaux
peuvent également générer des phases conductrices sans aucune brisure de symétrie : le célèbre
et insaisissable "métal de Bose".